Une femme a aussi le droit de parler de sexe sans être vulgaire ni passer pour une salope

Chronique de l’émission du 8 mars 2018, journée internationale des droits des femmes. Océane Perrot.

La dernière fois que j’ai pris le train, j’entre dans la voiture tranquille. Je vois que ma place est dans ce que la SNCF appelle un carré, c’est-à-dire deux fois deux sièges en face les uns des autres. Le numéro sur mon billet indique que mon siège est celui qui est le plus proche de la fenêtre et dans le sens de la marche. Un homme est assis à côté de ma place. Je lui explique poliment et en souriant que j’ai besoin d’accéder à mon siège. Il me réplique que normalement il est en face, il se lève alors et s’assoie donc à sa place et moi à la mienne.
Jusque-là, tout va bien si ce n’est qu’après 4 ou 5 minutes l’homme que j’ai visiblement énormément perturbé déclare bien fort à son voisin, qu’il ne connaissait pas, que toutes les femmes sont des connasses. L’inconnu à côté ne réagit pas. Il a compris que cela m’était adressé, mais il ne me défend pas. Il répond simplement qu’il ne met pas toutes les femmes dans le même panier. Comme si d’ailleurs les femmes étaient de vulgaires pommes qu’on trie. Un panier pour les pourries, les connasses et l’autre pour les bien mûres, les femmes à croquer.
J’ai donc en face de moi un ravi de la crèche qui insulte toutes les femmes, et explicitement moi, parce qu’il a dû bouger d’un siège et une telline qui préfère s’enfoncer dans le sable pour surtout ne pas trop se mouiller.
Alors que faites-vous ?
Rien. Je me tais parce que le ravi de la crèche cherche le conflit, je n’ai pas envie de lui donner ce qu’il réclame. Il en rajoute même lorsque je veux aller aux toilettes et que ses pieds me dérangent pour passer. Je lui demande poliment de les déplacer, il me regarde alors fixement sans les bouger. L’air de dire, je ne vais pas me déranger pour une femme quand même, c’est con et ça pue cette espèce-là.
Je me tais, mais à l’intérieur, je bous. J’ai envie de lui dire tout ce que je pense. Il ne se rend compte de tout ce que les femmes ont fait pour lui.

Sans blague, sauf si mes connaissances en biologie sont désuètes, sa mère c’est une femme.
Une femme qui depuis ses 13 ans a ses menstruations une fois par mois. Normal. Oui, mais difficile. Difficile d’être jeune et d’assumer d’avoir ses règles parce que c’est toujours vu comme quelque chose de sale. La société salit les règles, et donne honte aux femmes de les avoir. C’est répugnant, paraît-il. Au point que même pour les pubs pour les serviettes hygiéniques utilisent un liquide coloré en bleu pour ne pas faire trop rouge, trop réel, trop crade !
Et ces jeunes, ces gamines, elles subissent ça. Elles ont honte d’avoir des serviettes sur elles au collège ou au lycée. Je le sais parce que j’ai eu honte d’avoir mes règles. Les p’tits merdeux au collège s’amusent à fouiller dans le sac des filles pour trouver les fameuses protections. Quand ils mettent la main dessus, c’est la honte pour 15 jours, ou la vie, si la jeune manque de confiance en elle… Le début du harcèlement, largement toléré par la société parce que c’est vrai que les règles des femelles, c’est répugnant.
Mais bordel, ce n’est que du sang ! Quand on se coupe le doigt, la main… Trouve-t-on ça sale ? Non.
Mais là, c’est du sang qui sort des parties intimes donc c’est sale. Le sperme aussi sort des voies génitales. Pourtant personne n’en fait une affaire quand on parle de don de sperme, on ne crie pas au scandale.
Ah oui, mais désolée, les femmes vous êtes des femmes donc bon… C’est pas pareil quoi.
Mais les mecs ! D’où sortez-vous ? Du même endroit. Et ça fait un mal de chien pour vous sortir de là.
Et aux machos de répondre: Ce n’est pas pareil, c’est normal. Les menstruations donc ne sont pas normales. Pas naturelles, pas humain ou plutôt pas masculin. Sommes-nous des monstres si nous ne sommes pas des hommes ?
Je trouve ça immonde. C’est à la puberté que les filles commencent à se cacher. À avoir honte d’être une fille. À s’écraser face aux hommes. Le gouffre qui sépare les hommes des femmes grandit, devient de plus en plus important. Le sexe faible est nommé femme. Le sexe fort homme.
La messe est dite.
Et le ravi de la crèche du haut de ses 60 ans, ne déroge pas à la règle. Et en ne répondant rien, je fais pareil… Je cautionne. Mais comment faire : parler et déclencher un conflit avec un imbécile. Me taire, mépriser ses propos et en un sens les cautionner.
J’ai envie de me mettre debout sur le siège et de dire tout haut ce que je pense. Qu’être une femme ce n’est pas saigner une fois par mois et servir à se vider les couilles le reste du temps, pondre des mômes et les élever en les amenant au parc.
Non être une femme, c’est avoir de la force, du courage, lutter contre les stéréotypes, se battre pour qu’enfin on admette que c’est être Homo sapiens au même titre que les hommes.
Parce qu’
Une femme a aussi le droit de ne pas avoir honte de son corps.
Une femme a aussi le droit de disposer de son corps.
Une femme a aussi le droit d’avoir confiance en elle.
Une femme a aussi le droit d’être une héroïne et de ne pas toujours être la princesse en détresse.
Une femme a aussi le droit de faire le tour du monde avec un sac à dos.
Une femme a aussi le droit d’être drôle, de dire des injures.
Une femme a aussi le droit de pleurer sans pour autant être une chochotte.
Une femme a aussi le droit de se prendre une cuite sans être mauviette qui ne tient pas l’alcool.
Une femme a aussi le droit d’être célibataire, de ne pas vouloir d’enfant.
Une femme a aussi le droit de ne pas savoir cuisiner.
Une femme a aussi le droit de faire des sports de combat, de mettre des joggings.
Une femme a aussi le droit de séduire sans être une catin.
Une femme a aussi le droit de faire de la mécanique sans pour autant ressembler à Rocky.
Une femme a aussi le droit faire du rugby sans être homosexuelle.
Une femme a aussi le droit sortir avec un homme plus jeune, sans être une cougar.
Une femme a aussi le droit de rentrer tard le soir.
Une femme a aussi le droit de choisir comment elle s’habille sans réfléchir à ce que les hommes vont penser.
Une femme a aussi le droit de roter après avoir bu une bière.
Une femme a aussi le droit d’être grosse, mince, petite ou grande.
Une femme a aussi le droit de bien conduire.
Une femme a aussi le droit d’être pilote.
Une femme a aussi le droit d’être PDG, chercheuse, médecin, philosophe, écrivaine, peintre ou chef d’État.
Une femme a aussi le droit d’être fière d’elle.
Une femme a aussi le droit de jouir lors de rapports sexuels.
Une femme a aussi le droit de parler de sexe sans être vulgaire ni passer pour salope.
Une femme a aussi le droit de dire stop, de dire non.

Une femme a aussi le droit de répondre à un ravi de la crèche, à un homme lorsqu’elle se fait insulter.

Océane Perrot _ 12/02/18

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